télécharger l'article au format PDF

The Dark Knight rises

Alors, planant ce Batman ? Hésitant entre anticapitalisme et écoterrorisme, dénonciation des méthodes de la CIA et glorification de la police, déchéance et triomphe du superhéros, le troisième film de Christopher Nolan manque d’unité.

Pas de quoi s’embraser

Une remarque agacée pour commencer : à quoi rime cette mode de ne plus traduire les titres de films en anglais, alors même que leur public va voir très majoritairement des versions doublées plutôt que sous-titrées ? Passe encore pour des titres composés d’un seul mot passe-partout (Titanic, Avatar), mais là, c’est franchement charrié : The Dark Knight rises est non seulement imprononçable par quiconque n’a pas une licence d’anglais, mais en plus qui comprend sa signification ?

Encore, si cette mode concernait tous les films étrangers, on pourrait comprendre. Mais quand Pedro Almodovar sort Femmes au bord de la crise de nerfs, l’affiche sur les façades des salles françaises n’indique pas Mujeres al borde de un ataque de nervios. Et La vie des autres, de Florian Henckel von Donnersmarck ne s’est pas appelée, comme elle l’aurait pu, Das Leben der Anderen. Idem pour Carnets de voyage, de Walter Salles, dont le titre original est Diarios de motocicleta. Et on pourrait prendre bien d’autres exemples.

Mais revenons à cet envol du chevalier noir. Et saluons sa très attirante bande-annonce, presque contemplative, en tout cas parfaitement travaillée. Christopher Nolan est un artisan du cadrage impeccable, de l’image parfaite (comme dans Inception) et d’une utilisation relativement sobre des effets spéciaux permis par l’image numérique. Un grand bravo à l’impeccable bande originale d’Hans Zimmer, et à la prestation de la délicieuse Anne Hathaway dans le rôle de Catwoman.

Pour le reste, la déception domine. L’intervention terroriste dans Wall Street traduit-elle une critique de l’ultralibéralisme, comme pourrait aussi le laisser penser le discours de Bane dans le stade de base-ball (dont la pelouse a été littéralement éventrée, soufflée de l’intérieur) ? Pas vraiment : le scénario de Jonathan Nolan, frère de Christopher, ne brille pas par son originalité, et penche parfois franchement dans le côté réac des aventures de Batman. L’hommage à la police de Gotham City, sortant affronter quasiment à mains nues la populace dirigée par Bane, en est un exemple parmi d’autres.

Comme presque toujours dans les films de super-héros, les invraisemblances sont légion. Elles concernent essentiellement le personnage principal, quasi infirme au début du film, reclus dans son manoir, et retrouvant la forme olympique dès qu’il décide de revêtir le costume et la cape. Ou encore le rebondissement final sur Marion Cotillard, dont la prestation est proche de la catastrophe, alors qu’elle avait été si convainquante dans De rouille et d’os (elle alternait les deux tournages pendant l’été 2011). Comme quoi, même avec ses petits moyens et ces anti-héros, le cinéma français a du bon.

Le cinéma américain, lui, du moins sa catégorie blockbusters, semble encore et toujours (comme si le 11 septembre n’avait pas eu lieu) autant fasciné par la destruction de ses villes et la lutte du bien contre le mal, des méchants contre les gentils, comme le disent les enfants. L’ambiguité et la complexité ne sont pas de mises. C’est bien dommage.


The Dark Knight Rises - Bande annonce 2 vost par CineMovies.fr