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Le grand vol de la banque de Taos

Le seul ouvrage de Tony Hillerman que je n’avais pas encore lu, alors qu’il a été traduit en français il y a une douzaine d’années. Ce n’est pas un roman, mais un recueil de textes, nouvelles et articles de journaux écrits pendant la période où le romancier américain était encore journaliste au Nouveau-Mexique, dans les années 50-60.
Evidemment, il n’est ici pas question de Joe Leaphorn et de Jim Chee, ses deux personnages fétiches de la police tribale navajo. Dans toute son œuvre de fiction, Hillerman ne s’est passé d’eux que deux fois, pour La mouche sur le mur et pour Moon. Force est de constater que ce ne sont pas ses meilleurs romans.
Pour autant, la réserve navajo, l’histoire des premiers américains et l’archéologie sont ommniprésentes tout au long du recueil. On peut le lire comme un traité d’histoire, de géographie et de sociologie écrit avec le sens du second degré dont Tony Hillerman est passé maître. Chez lui, le moindre petit événement (comme le fameux grand vol de la banque de Taos qui donne son titre au recueil) prend une dimension épique, surtout dans cette région rurale et semi-désertique où les histoires vont bon train. On y trouve aussi la genèse et la trame de plusieurs de ses romans, notamment Là où dansent les morts (son chef d’œuvre) et Le voleur de temps.
On y sent aussi, à chaque page, l’infinie tendresse qu’il éprouve (et qu’il transmet) pour les paysages de la réserve et pour ceux qui y vivent. A la fin du deuxième texte, Le cœur même de notre pays, il cite un extrait du chant de la Voie de la Nuit :

Dans la maison faite d’aube,
Dans la maison faite de la lumière du crépuscule,
Dans la maison faite de nuage de pluie,
Avec la beauté devant moi, je marche,
Avec la beauté derrière moi, je marche,
Avec la beauté tout autour de moi, je marche.